jeudi 17 mars 2011

Panser les Plaies

Avec beaucoup de recul, nous constatons que le bouleversement en Tunisie a éveillé en nous des sentiments très forts. Et ce bouleversement a touché la région toute entière – ou presque – donnant lieu à un véritable butterfly effect, un tremblement de terre politique pour être plus explicite.

Au-delà de nos frontières, ce bouleversement a provoqué un tollé en Occident car nos amis de l’autre côté de la méditerranée ont sévèrement critiqué la manière avec laquelle leurs gouvernements ont réagi face à cet événement éclair et ‘‘inattendu’’.
Pour la première fois, un peuple arabe a laissé de coté sa peur et s’est laissé gagner par le courage et l’espoir. C’est ainsi que la révolution tunisienne est née. Une révolution spontanée, une révolution citoyenne !

Défis ne rime pas avec Méfiance

Le chemin parcouru depuis le début de cette révolution n’est pas très long. Néanmoins, ce que nous avons accompli depuis est salutaire. Faut-il rappeler que la Tunisie a ratifié l’ensemble des traités internationaux sans aucune réserve ? Faut-il rappeler que le pluralisme politique est de mise aujourd’hui avec une trentaine de partis politiques légalisés ? D’un autre côté, internet est plus libre que jamais en Tunisie ce qui nous a valu de ne plus être blacklisté par Reporters Sans Frontières (RSF) et ce qui a valu à nos confrères de Nawaat le Prix du Net-Citoyen.

A maintes reprises, dans nos articles, nous avons dit que les défis qui nous attendent, nous tunisiens, sont colossaux… Il fallait s’en douter : après la révolution du 14-Janvier, rien n’est plus pareil !
En effet, nous devons examiner le futur de la Tunisie en profondeur sans s’abandonner à la naïveté et à l’angélisme.

Nous avons tous conscience que cette période est critique car déterminante. Pourtant, certains n’arrivent pas à se défaire de leur vieux réflexe : la méfiance !
Et ces personnes là se méfient des uns et des autres. Du coup, plus personne n’est intègre à leurs yeux. Par voie de conséquence, on tombe dans une surenchère dont on se serait bien passé. La logique des choses aujourd’hui est clairement la suivante : « Je participe aux manifestations, aux marches, aux sit-in et je me substitue à la justice s’il le faut donc je suis plus tunisien que toi ! ». C’est malheureux mais c’est la réalité. Et au passage, on voudrait en profiter pour dire que ce n’est certainement pas l’image du syndicalisme tunisien.

Conflit politique et idéologique

Il est clair que quiconque qui suit l’actualité de la Tunisie constate que nous sommes face à un conflit politique et idéologique. En réalité, il est difficile de se débarrasser des scories de l’ancien régime d’autant plus que nous n’avons pas de véritable tradition démocratique. Comment dire ? C’est un peu la cacophonie maintenant mais nous sommes persuadés que ça se calmera avec le temps. Et il le faut car une bonne dose de sérénité est nécessaire pour faire face au marasme social, économique et politique que connaît la Tunisie.
De ce fait, il est important de passer la marche du dessus car c’est seulement à cette condition que nous ferons de la Tunisie un pays remarquable et remarqué tant sur l’échelle régionale qu’internationale.

Au risque de nous répéter, il est impératif de faire preuve d’une vigilance à tout instant pour éviter de tomber dans le chaos. Pour ce faire, il est utile de raviver la ‘mission originelle’ de la Révolution et de faire valoir son ambition. Pour autant, il ne s’agit pas d’être à la remorque de la modernité et il ne s’agit pas de faire table rase de nos acquis ce qui, en définitive, est inique et absurde. Il ne s’agit pas non plus de réfuter ce contraste inévitable (qui n’est pas préjudiciable au fond) du moment que chacun d’entre nous a ses idées et ses idéaux. Dès lors, nous devons construire un modèle politique et démocratique qui répond aux aspirations des tunisiennes et des tunisiens quelle que soit leur sensibilité.

Tunisia… The place to be now!

D.R.
Pour reprendre le slogan de la dernière campagne de séduction lancée le 14 février 2011 à l’initiative du Ministère tunisien du tourisme, la Tunisie est devenue l’endroit où il faut être à l’heure où la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) fait face à une levée populaire sans précédent.
Mais à défaut de voir les touristes débarquer chez nous, ce sont plutôt des dizaines de diplomates et ministres qui ont visité notre pays dans le cadre de visites officielles. Et ce n’est pas plus mal !
En effet, cela prouve que le pays intéresse de très près les gouvernements étrangers qui veulent miser sur cette démocratie naissante. C’est tout à notre honneur et au leur !

Pendant des années, on a vu des investisseurs étrangers débarquer et, franchement, peu de politiciens et hauts dirigeants se sont succédés sur nos sols. Quand c’est enfin le cas, des voix s’élèvent pour dénoncer une conspiration absurde. Arrêtons de voir les magouilles là où elles ne le sont pas et saisissons cette chance de redorer le blason un peu terni de notre pays.

Comme nous l’avons dit dans un précédent article Appel au Réveil : « un pays ne peut vivre en autarcie ». Partant de ce constat, il nous faut le concours d’investisseurs qui soient à la hauteur des ambitions de la nouvelle Tunisie post-révolution mais il nous faut également lever des fonds auprès de ces mêmes gouvernements et organismes internationaux. Comprenez là qu’il s’agit de prêts contractés par la Tunisie et qui seront remboursées dans les années à venir. Donc, la souveraineté de notre pays n’est pas mise en question comme se plaisent à le dire certains ! Au fait, rappelons que ce ne sont pas moins de 400'000 personnes qui sont au chômage en Tunisie et ils ont le droit de travailler et vivre dignement…

En somme, tout est question de lobbying pour ramener le plus grand nombre d’investisseurs, pour négocier des taux avantageux, pour rééchelonner les dettes (éventuellement), etc.

Nul ne peut contester que nous sommes dans une période décisive de l’Histoire moderne de la Tunisie et que tous les tunisiens attendent impatiemment les réalisations du gouvernement provisoire. Cependant, ces réalisations ne se feront pas en un claquement de doigt. Cela prendra du temps mais une chose est sûre : c’est une responsabilité collective.

Les obstacles sont encore nombreux, c’est inéluctable. Mais les défis ne sont pas insurmontables, bien au contraire. Il est évident que la prospérité – tant voulu – et la liberté – qui commence à s’enraciner – passent par une période transitoire importante. Pendant ce temps, nous nous devons de réussir la création d’un modèle démocratique propre à nous… Un modèle démocratique à l’image de notre histoire, de notre culture et de notre mode de vie…